Mon fils s’est suicidé

Mon fils David était gardien de la paix. Le 17 octobre 2008, il s’est suicidé avec son arme de service. Depuis, je me bats pour que les autorités prennent des mesures fortes pour lutter contre le suicide des policiers. Aidez-moi à obtenir un plan de prévention ambitieux de la part du Ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, pour que l’on protège enfin ceux qui dédient leur vie à la protection des autres.

David a été réarmé 15 jours après qu’il ait repris son poste, à la suite d’une dépréssion sévère. On ne guérit pas en 15 jours … mais comme me l’a dit le commandant qui avait David sous ces ordres, « l’arme est le prestige du policier ». Ce n’est pas un policier qui est parti, c’est mon fils. Et aujourd’hui, personne n’écoute la détresse de tous ces papas et ces mamans qui comme moi ont perdu leur enfant.

On compte en moyenne 42 suicides de policiers par an depuis 5 ans. En 2013 encore, plusieurs gardiens de la paix se sont suicidés avec leur arme de service, laissant leurs familles détruites par le chagrin. Tout cela doit cesser.

Actuellement, quand un gardien de la paix est en dépression, il ne bénéficie pas d’une aide psychologique suffisante. Habitant à Dieppe, David devait aller à Rouen pour voir sa psychologue. Un jour, il ne se sentait pas bien. Il l’a appelé, c’était trop loin, elle avait peu de temps à lui consacrer. 3 jours après, il se suicidait.

Pire, les médecins qui décident si un gardien de la paix est apte à reprendre son service et à être réarmé n’ont aucun moyens : ils ne se basent que sur ce que le patient veut bien leur dire et n’ont pas accès aux dossiers médicaux et antécédents du patient.

Mon fils était dépressif. Il a fait plusieurs tentatives de suicide : il s’est lacéré les bras, a tenté de mettre fin à ses jours en provoquant un accident de voiture. Etre policier dans la ville ou il est né n’était pas facile. Il me disait avoir souvent peur que les personnes qu’il arrêtait et qui étaient ensuite incarcérées ne le menacent lorsqu’elles sortaient.

Sur le dossier médical de David, il était marqué noir sur blanc qu’il était en dépression sévère. En janvier 2008 sa dépression commence, puis en juin les premiers épisodes de tentative de suicide. Il est alors arrêté puis reprend le travail en septembre. On le met au bureau des plaintes. 15 jours après avoir repris le travail, on lui redonne son arme de service et il part en opération sur le terrain. Le vendredi soir, on le laisse partir avec son arme. Il se suicidera le soir même, 3 jours seulement après avoir été réarmé.

J’ai écris à tous les ministres en exercice de ce gouvernement et des précédents, tous m’ont répondu la même chose : qu’ils étaient désolés et comprenaient ma peine. Mais on m’a aussi dit que David avait menti sur son état et qu’il était impossible de déceler qu’il était dangereux. N’est ce pas aux psychologues donnant l’autorisation de réarmer mon fils de déceler ses pulsions suicidaires et de savoir s’il ment, juste pour pouvoir mettre fin à sa souffrance?

Les gouvernement successifs ont lancé de grandes enquêtes pour déterminer les causes et les solutions contre le suicide des policiers. J’ai moi même participé à une enquête de l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) sur le suicide des policiers en 2010.

En janvier 2013, les services d’inspection de Ministère de l’Intérieur ont rendu un rapport d’audit sur la prévention du suicide au sein des personnels des forces de police et de gendarmerie. Mais où en est-on aujourd’hui ? Nulle part ! Ces préconisations doivent enfin mises en oeuvre!

Je demande en urgence au Ministère :

– que les médecins qui réarment les policiers aient accès aux dossiers psychologiques des gardiens de la paix pour prendre la décision de les réarmer en toute connaissance des conséquences possibles

– que le nombre de postes de psychologues soit augmenté : 60 personnes sur tout le territoire ne peuvent décemment suivre l’état psychologique de tous les gardiens de la paix

– que des sessions de prévention soient organisées régulièrement dans les commissariats et pas une fois lors de la formation des gardiens de la paix comme actuellement : de nombreuses études ont montré que la prévention était la meilleure solution contre le suicide : si ceux-ci savent qu’ils ont quelqu’un à qui parler, ils seront moins nombreux à passer à l’acte. Le rapport d’audit interne rendu en janvier 2013 et les chiffres sont d’ailleurs là pour le prouver, puisque quand le nombre d’intervention des psychologues de soutien augmente, le nombre de passage à l’acte baisse.

Cela fait 5 ans que je veux seulement qu’on fasse plus qu’entendre mon appel : qu’on l’écoute et qu’on agisse. Manuel Valls dit souvent qu’il soutient les policiers dans leur action, lorsqu’ils sont victimes d’accidents lors de leur service. Stopper les suicides des policiers doit pour lui être une urgence.

La perte de mon fils a été une rude épreuve. Et aujourd’hui je dois mener plusieurs combats de front. Peu après le départ de David, on m’a diagnostiqué un cancer qui m’affaiblit de plus en plus. Je n’ai qu’un souhait, faire aboutir cette pétition avant que je n’ai plus la force de me battre, au nom de toutes les familles qui ont perdu leur enfant comme moi.

Aidez moi pour que l’on protège enfin ceux qui dédient leur vie à la protection des autres.
Patricia Cordier.

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